Jupe de femme mariée "Yokal" de Papouasie Occidentale
Matières: Fibres de Ficus sp. et autres fibres végétales, écorce d'orchidée Dendrobium sp. et Agrostophyllum majus
Techniques : Vannerie et tressage
Yokal* c’est ainsi que ce type de jupe est désignée par l’un des groupes peuplant la Papouasie occidentale, les Dani. Celle exposée en mars provient du village de Kurulu placé au nord-est de la vallée de Baliem.
Située au coeur des hautes montagnes neigeuses et des forêts impénétrables du centre de la Papouasie, la vallée de Baliem s’étire sur plus de soixante kilomètres de long et sur une vingtaine de kilomètres de large. Elle est difficilement accessible autrement que par avion. D’ailleurs, elle n’a été découverte tardivement en 1938 par les Hollandais, lors d’une expédition scientifique. Ses habitants, essentiellement d’ethnie Dani ou Ndani, sont ainsi longtemps restés isolés et continuent de vivre en marge de la société indonésienne moderne.
En 1961, l’expédition américaine «Harvard-Peabody», y fut organisée pour étudier la vie de ce peuple mystérieux. À cette occasion, le cinéaste Robert Gardner tourna le film Dead Birds « Oiseaux morts », un documentaire à travers lequel on comprend que les Dani cultivent un système élaboré de guerres rituelles qui permettent le maintien de l’ordre et le « renouveau » de leur société. Le titre du film Dead Birds se réfère à la fois à un terme dani qui désigne les ornements et armes, les trophées de guerre, mais fait également écho aux croyances de ces populations selon lesquelles les hommes sont des oiseaux et que pour cette raison, ils sont destinés à mourir.
Parmi l’immense richesse de la culture matérielle dani, nous avons souhaité mettre ici en avant un vêtement de femme (he) dani. Traditionnellement, la tenue vestimentaire des femmes a pour fonction de couvrir le sexe; une sorte de jupe très courte, faite de plusieurs cercles de tresses végétales qui s’enroulent autour des hanches. Il en existe deux sortes portées distinctement par la fille et la femme selon son âge et son statut :
- la jupe sali portée par les petites et jeunes filles qui ne sont pas encore mariées;
- la jupe yokal qui est le vêtement porté par les femmes mariées. Elle est confectionnée à partir de fibres de win (Ficus drupacea), lisani (Acalypha amentacea), yain (Ficus sp.), yohewisa (Boehmeria nivea), yowalat (Cipholopus lutescens), digi (Astronia sp.), digit (Boehmeria malabarica), ilak-ilak (Alixia floribunda), jawi (Cyrtandra sp.), sel (Panadanus sp.) tressées ou torsadées ensemble avec des brins d’écorce de tiges d’orchidées; ce qui apporte de la couleur à la parure (jaune et rouge). Les écorces de tiges d’orchidées sont un ornement spécifique au yokal. Les Dani utilisent quatre espèces d’orchidées : wi kiabut (Dendrobium sp.), wi kilaboga (Dendrobium piestocaulon), wi wampi (Dendrobium phlox) et wi wamaga (Agrostophyllum majus).
Ces grandes longueurs de fibres végétales tressées sont enroulées plusieurs fois et attachées à une ficelle (yokal yao). La partie intérieure (l’envers de la jupe) est appelée yokal yibin, et la partie apparente, yokal wiyakul. L’ensemble est nommé yokal ebe.
La femme porte le yokal pour la première fois lors de son mariage. À la cérémonie du mariage, he yokal , la mariée abandonne donc son sali pour se vêtir de son yokal spécialement confectionné pour cette occasion par les akouni, des hommes détenteurs de ce savoir.
*Les termes vernaculaires sont en Ndani