Monnaie kanak blanche de Nouvelle-Calédonie

Les objets du mois
Objet du mois de
Mai
Cette monnaie kanak blanche de perles de coquillage a été collectée à la tribu de Goro, Yaté, aire Drubéa-Kaponé au sud de la Nouvelle-Calédonie, dans les années 1970
MNC 2018.3.2ab 
Longueur de la monnaie : 69 cm ; Longueur de l’étui : 19 cm ; largeur de l’étui : 10 cm.
Matière (s) : perles de coquillage, poils de roussette, fibres de bourre de coco, nacre (monnaie) ; étui foliaire du cocotier, tissu européen, fil de coton (étui)
Technique (s) : Polissage, tressage, enfilage, couture

L’objet présenté ce mois-ci est une monnaie de perles de coquillages qui a appartenu au grand chef Pétro Attiti de la région de Yaté. D’après nos informations, il le détenait de ses grands-parents et l’a gardé précieusement avant de l’offrir à un fonctionnaire européen en poste en Nouvelle-Calédonie entre 1976 et 1979 à Nouméa. Nous ne connaissons pas le lieu de création de cet objet qui a certainement été reçu par la famille Attiti au cours d’une cérémonie coutumière, donc en provenance d’une autre région.

En effet, la monnaie de perles de coquillage était fabriquée seulement au nord jusqu’à la région centre de la Grande Terre. Elle est désignée différemment selon les endroits et les langues qui y sont parlées : mie en langue a’jië, thewe en langue fwâi, âdi en langue paicî ou encore en langue xârâcùù...  

Monnaie en os dite du sud de la Grande Terre

© Coll du MNC/ Anne Chopin

Dans la région sud, étaient connus d’autres types de monnaie, notamment celle composée d’os de frégate ou d’albatros dont une extrémité est ornée d’un surtressage en cordelettes de poils de roussette. On peut en voir un exemplaire dans les collections du musée de Nouvelle-Calédonie mais ce type d’objet d’échange, contrairement aux monnaies de perles, ne sont plus en circulation aujourd’hui.  

On distingue deux parties principales dans la monnaie de perles de coquillage :

  • l’étui de la monnaie ou sa « maison » découpée dans un tissu foliaire de cocotier ou du tapa (étoffe d’écorce battue) est appelé en a’jië, tivinyari ou mwâ mie (« mwâ », « maison ») ;
  • la monnaie ou mie en a’jië, est composée généralement d’un chapelet de perles résultant de la découpe, du perçage et du polissage de la pointe d’un cône comme le Conus ebreus, ou plus fréquemment aujourd’hui d’os de roussettes.

La monnaie de perles de coquillage est un objet d’échange d’une grande valeur circulant lors de cérémonies rituelles comme celles liées à certaines étapes importantes de la vie d’une personne. 

La société kanak trouve son équilibre dans la mise en place de réseaux de relations et d’alliances (vi béé en a’jië) considérées aujourd’hui comme « ancestrales » car entretenues au fil des générations.

Investie d’une représentation symbolique particulière et sacrée, cette monnaie symbolise l’ancêtre aîné d’un clan comme les sculptures de la grande case (la flèche faîtière, les appliques latérales, le seuil et le linteau de porte,…). Chaque clan conserve une ou plusieurs monnaies au milieu d’autres objets précieux dans son  panier sacré appelé nékaré arii en a’jië . Gardé par le cadet, ce dernier renferme la puissance du groupe et est placé en dessous de la sculpture faîtière de la grande case.

Le système d’échanges impliquant la circulation de la monnaie de perles de coquillage marque la permanence entre le monde des vivants et celui des morts situé, d’après les croyances kanak et océaniennes, en mer d’où proviennent justement la plupart des matériaux qui composent le « chapelet ».

Le chef K. Retio de Coula à Houaïlou montre son trésor de monnaies de coquillage

© SANC 2Num 13-332 et 333