Hache de cérémonie kanak de Tiouandé

Les objets du mois
Objet du mois de
Juillet
Cette hache de cérémonie Kanak à la lame en néphrite souvent appelée "ostensoir" aurait été offerte au colon Charles Ragot, par le chef de la tribu de Tiouandé
MNC 2017.3.1
Hauteur 
: 68 cm - Largeur : 26 cm - Poids : 1,680 Kg
Matériaux : Néphrite, bois, fibres de coco (Cocos nucifera - Palmae), poils de roussette (Pteropus sp.), traces d’écorce de mûrier à papier battue ou tapa (Broussonetia papyrifera)
Techniques : Taillage, polissage, perçage, tressage

La hache de cérémonie dite également « ostensoir » est constituée d’un disque de pierre communément appelé jade. Ce disque de néphrite est percé de deux trous servant à passer des sparteries ou des liens pour la  fixer au manche. La pierre polie peut revêtir différentes teintes allant de couleurs ternes se rapprochant du noir au blanc crème, en passant par du vert clair. Le manche en bois, est généralement enveloppé dans une bande de tapa maintenue par une tresse de fibres de coco ou de poils de roussette. Il se termine à sa base par un socle fait d’une demi-noix de coco dans laquelle de petits coquillages ou de petites graines sont généralement enfermés pour que l’orateur se servant de la hache puisse ponctuer son discours par des bruits de grelots.

L’appellation « hache ostensoir » provient de l’Amiral Bruny d’Entrecasteaux qui lors de son expédition en Nouvelle-Calédonie en 1793 découvrit cet étrange objet. Sa ressemblance avec l’ostensoir du culte catholique destiné à la présentation aux fidèles de l’hostie consacrée, entérina son appellation jusqu’à  aujourd’hui. Bien que le naturaliste de l’expédition Jacques-Julien Houtou de La Billardière obtint le nom de n’bouet (Désignant « casse-tête » en langue nyelâyu de Balade, Pouebo), l’objet finement décoré ne permettait pas de découper le corps des victimes.

Représentation du cycle du jade décrit par Maurice Leenhardt
Représentation du cycle du jade décrit par Maurice Leenhardt

 

Formalisant une tradition d’échanges entre chefferies pour renforcer les alliances, la pierre travaillée parcourait un itinéraire allant de l’île Ouen à l’île des Pins ou Yaté puis les îles Loyauté jusqu’à Ouvéa avant de revenir sur la Grande Terre. Ce cycle décrit par le pasteur Maurice Leenhardt mais déjà périmé en 1937 pourrait laisser entrevoir d’autres sources d’extraction et de fabrication sur la Grande Terre comme l’attestent des études récentes en archéologie. Considérée comme un objet de prestige et de richesse, la hache cérémonielle se transmettait de génération en génération.

Bambou gravé illustrant des haches de cérémonie. MNC 91.1.4 © Eric Dell’Erba

 

A partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, nombre de modèles qui furent collectés par les Occidentaux montrent des caractéristiques lithiques et végétales différentes. Plus grands et plus épais, les disques de pierre étaient faits plus hâtivement pour satisfaire des relations commerciales avec les résidents de passage tels les administrateurs coloniaux ou collectionneurs occidentaux. Le tapa laissa place au calicot rouge ou bleu. Toutefois, l’ajout d’éléments exogènes lors de la fabrication n’invalidait pas forcément le cycle traditionnel de l’objet.

D’après les informations recueillies auprès d’un des descendants du colon Charles Ragot, la hache ici exposée lui aurait été offerte par le chef de la tribu de Tiouandé. Charles Ragot est arrivé en Nouvelle-Calédonie en 1875 et s’installa à Ouégoa. Eugène, un de ses enfants, s’installa sur une propriété au lieu-dit Tiouandé en 1909.