La première causerie de la saison 2010 au Musée de Nouvelle-Calédonie s’inscrit dans le cadre prestigieux de la grande expositon temporaire proposée à Nouméa du 27 mars au 4 octobre 2010, grâce au partenariat entre le Musée de Nouvelle-Calédonie et le Musée d’Ethnographie de Genève, et consacrée aux bambous gravés.
L’art ancien des bambous gravés a inspiré et continue à influencer aujourd’hui nombre d’artistes contemporains. L’une de ces artises est Micheline NEPORON.
Micheline, qui vit aujourd’hui de son art, est considérée comme un maître dans l’art du bambou gravé, même si sa modestie refuse ce statut. A ces yeux, le bambou comme sa peinture, c’est la continuité, le cycle de la vie dont elle aime à illustrer les grandes étapes : la naissance, la vie à deux, les difficultés inévitables, et aussi la fête car il ne faut jamais oublier de s’amuser dans la vie. Ses œuvres représentent des scènes de la vie quotidienne, la simplicité des choses vécues chaque jour. Profondément choquée par le trop grand nombre de jeunes qui meurent, elle évoque dans ses toiles les accidents de la route, l’alcool, la délinquance, mais dit-elle : « chez moi, il n’y a que des blessés, j’enlève la mort ».
Ses personnages sont certes des jeunes d’aujourd’hui avec leurs problèmes, mais aussi ceux qui travaillent aux champs ou qui portent des attachés-case : « évolution, changement, telle est à l’évidence la marque de la vie des kanak aujourd’hui qu’elle illustre dans ses œuvres.
Dès son enfance, le besoin de s’exprimer dans le domaine artistique, est inné chez elle, et elle ne se reconnaît pas de maîtres véritables. Toutefois, ses oncles maternels étaient tous sculpteurs. L’un d’entre eux, qui était en outre son parrain, l’a particulièrement marquée. A Yaté, où il vivait, il déterrait des racines, il les sculptait et les vendait ensuite aux curieux de passage. Avec lui, son œil s’est exercé aux formes qu’elle voyait dans la nature : arbres, vététaux, racines, mais elle a laissé la sculpture aux hommes, pour s’intéresser très vite aux bambous. Elle a habité dans sa jeunesse au Quartier Latin, à Nouméa, de ce fait, elle entrait parfois au Musée où elle a découvert les bambous gravés anciens. Elle a entrepris de les copier, mais se souvient encore des longs efforts nécessaires pour y parvenir.
Sa formation à l’Ecole d’art de Nouméa lui a permis de dévouvrir de nouveaux matériaux et de nouvelles techniques, c’est à partir de là qu’elle a décidé de mettre de la couleur sur ses bambous. Toutefois, à côté de ces bambous de style contemporain avec couleur et vernis, elle réalise aussi des bambous de style ancien, avec gravure noir de bancoule. On trouve rarement des motifs abstraits sur ses bambous, car elle préfère y raconter des histoires. Histoires dans sa tête, ou textes de récits qu’on lui donne, elle développe l’histoire sur le bambou, en commençant par le haut, comme un film qui se déroule sous les yeux du spectateur, ou comme une bande-dessinée qui se lit du début à la fin.
On peut trouver des œuvres de Micheline NEPORON au Centre culturel Tjibaou, au Musée national de Bamako au Mali, à la Mairie de Paris et dans plusieurs musées européens. Comme ses œuvres, elle voyage et elle tient pour importante cette possibilité de s’améliorer et de s’ouvrir à d’autres inspirations.
« Les Occidentaux, avoue-t-elle très simplement, apprécient mes œuvres car ils sont frappés par la vie simple que je représente, vie perdue et disparue aujourd’hui en Europe. Ce sont des scènes de l’humanité, tout être humain passe par ce que je raconte dans mes créations, c’est pourquoi les gens sont touchés par mes œuvres.